Durant mon adolescence, j’ai découvert dans la bibliothèque familiale un exemplaire d’un roman de Carette datant de cette époque : Le péché de complication, paru en 1942 aux Éditions de la Toison d’Or, une émanation du ministère des Affaires étrangères de l’Allemagne nazie, qui publierait en Belgique la fine fleur de la collaboration : Léon Degrelle, führer du mouvement fasciste pronazi Rex, le politicien Henri de Man, théoricien avant-guerre d’une variété originale du fascisme : le « planisme », et Premier ministre durant la première année de l’occupation quand il prônera un monarchisme autoritaire. S’il n’a effectivement rien à se reprocher, pourquoi, après la défaite de l’Axe à Stalingrad, retrouve-t-on soudain Carette en Italie, errant à la dérive avec son épouse et sa belle-famille, pris à contre-pied par le soulèvement contre Mussolini, et se retrouvant du coup comme une foule d’autres fuyards, alimentant une réserve d’otages en puissance, cherchant à se concilier, dans des rendez-vous dont rien ne nous est dissimulé, ce qu’il reste d’administration italienne compréhensive envers le règne de Mussolini qui vient de s’achever ? L’Académie française n’y vit cependant que du feu en l’élisant en 1975, qui fit de lui l’un de ses immortels, au grand dam proclamé d’Alain Finkielkraut, son successeur au même fauteuil en 2016, qui dans son discours de réception sembla cependant prendre pour argent comptant tout ce qui est affirmé dans Les années courtes : « La condamnation à quinze ans de travaux forcés assortie de l’interdiction à perpétuité de publier tout article et tout livre est donc exorbitante », déclara ainsi Finkielkraut.
Author: Paul Jorion
Published at: 2025-06-29 17:53:40
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