”Il faudra que je me souvienne plus tard de cet horrible camp froidement, gravement, sans haine, mais avec lucidité…”

”Il faudra que je me souvienne plus tard de cet horrible camp froidement, gravement, sans haine, mais avec lucidité…”


Assise dans son salon entourée de sa documentation et des ouvrages qu'elle a fait paraître au cours de ses trente dernières années, dont le dernier en date Ces dames de Ravensbrück, 1939-1945, Claire Pahaut déplie, dans les détails, le récit des derniers jours du camp de concentration réservé aux femmes prisonnières du régime nazi. En 2024, elle fait paraître, aux Archives Générales du Royaume, une somme documentaire, Ces dames de Ravensbrûck, 1939-1945, Contribution au mémorial belge des femmes déportées à Ravensbrück, travail archivistique titanesque, reconstitution minutieuse de parcours individuels, dont on mesure l'utilité à l'aune d'une anecdote partagée au débotté : "J'avais offert ce livre à quelqu'un qui l'avait posé sur la table de la cuisine. […] Il faudra que je me souvienne plus tard de cet horrible camp froidement, gravement, sans haine, mais avec lucidité, pourtant, de ce triste et laid paysage, du vol incessant des corbeaux, des longs blocs sur ces marécages froids et noirs comme des tombeaux, de ces femmes emmitouflées de vieux papiers et de chiffons de ces pauvres jambes gelées qui dansent dans l'appel trop long, des batailles à coups de louche, à coups de seau, à coups de poing, de la crispation des bouches quand la soupe n'arrive point, de ces membres jaunis que rongent de larges ulcères en plaque, de ces toux à perdre haleine, de ces regards désespérés tournés vers la terre lointaine, il faudra que je m'en souvienne".

Author: Aurore Vaucelle


Published at: 2025-04-28 13:29:10

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