De la guerre en zone grise

De la guerre en zone grise


Alors qu’est manifeste l’incapacité de la « communauté internationale » à conjurer les spectres de « guerres majeures », plusieurs spécialistes soulignent et analysent les modifications du champ militaire : distribution de la puissance, imprévisibilité des acteurs, facilité d’accès aux techniques d’armement et de communication, quasi-disparition de la dissuasion nucléaire comme facteur modérateur — et brouillage des limites entre guerre et paix, public et privé, armée et police… Ce brouillage crée une ambiguïté qui, pour Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, ancien directeur de l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (Irsem) à Paris, si elle aide à déstabiliser l’adversaire, revient surtout à « arsenaliser » l’économie, l’énergie, la faim, la pêche, les réfugiés, l’information, le droit ou la santé : « Tout peut devenir une arme » (1). Comme le notait naguère l’amiral Christophe Prazuck, l’état de « guerre permanente » ainsi créé fait le lit des stratégies hybrides, qui permettent d’« affaiblir durablement des économies, des États, des alliances : la théorie de la “victoire décisive” est remplacée par la pratique de la “souffrance interminable” » (2). La Russie ou la Chine, des puissances régionales comme l’Iran, « y jouent de la difficulté à attribuer les responsabilités de manœuvres pourtant très offensives », relève le général Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées françaises, pour qui « l’usage désinhibé et dorénavant volontaire de la force est devenu normal.

Author: Philippe Leymarie


Published at: 2025-04-08 14:14:46

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