Une rigueur « morale », faisant du Vieux Continent l’arbitre des élégances, souvent présentée comme la meilleure manifestation de son « réveil géopolitique », alors qu’elle s’avère, en réalité, parfaitement contre-productive à l’heure d’un monde désoccidentalisé, soucieux de s’émanciper de la tutelle morale et politique de l’Occident, comme l’a attesté le refus d’une écrasante majorité de pays d’épouser ses sanctions contre la Russie. Son indéniable réussite, attestée par son statut de première économie du monde, selon les derniers classements du FMI (alors qu’elle ne représentait que 10 % de l’économie américaine en 1980), son avance technologique dans des secteurs d’avenir clés (énergies décarbonées, télécommunication, Intelligence artificielle, transport) et les investissements qu’elles disséminent aux quatre coins du globe pour financer les infrastructures nécessaires à ses nouvelles routes de la soie, questionne, par contraste, la pertinence d'un modèle occidental en recul jusque sur son propre terrain de jeu historique, celui du progrès, de l'innovation, de la puissance. Ce défi sera sans doute le plus difficile à relever, car le moins naturel pour une Europe ne sachant plus se définir par l’histoire et la culture, autrement que par l’attachement à la « démocratie », essentiel mais qui ne la spécifie pas, et la référence à l' « Occident », qui la condamne à s’arrimer à une logique de bloc idéologique surannée, alors que prime dans le monde l’affirmation de stratégies souples, multi-alignées, à l’image du Brésil ou de l’Inde.
Author: Max-Erwann Gastineau
Published at: 2025-07-26 07:00:00
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